mardi 23 juillet 2024

MON QUARTIER A UNE HISTOIRE # 2 : LA FERME DU HUTIN.

Entre habitations et friches, le Hutin est aujourd'hui l'un des principaux lieux-dits qui composent le quartier ECHO - et l'une de ses principales réserves de foncier. Des travaux sont prévus sur ce qui est aujourd'hui la friche de La Lainière, entre la réalisation de la Voie Verte, une zone à valeur économique et des logements -des travaux qui devraient se lancer l'année prochaine. 


                                   

De 1596 à 1894 : de la campagne jusqu'à la fin des champs.

Mais le Hutin, comme nous avons pu le voir dans notre précédente chronique "Mon Quartier a une histoire #1", était un espace de campagne séparé par le sentier du Mont-à-Leux entre le Bas-Hutin et le Haut-Hutin. Il englobait un vaste espace entre la Ferme Salembier rue d'Oran (la Grande Vigne) et l'ensemble du territoire de Wattrelos. Le Hutin tiendrait d'ailleurs son nom d'une cense et d'un hameau apparaissant dans les recensements de 1596 et 1673. 

Historien, Théodore-Désiré-Joseph LEURIDAN explique notamment dans Les sources de l'Histoire de Roubaix (1882, Imprimerie Dardenne), que cette cense aurait été habitée pendant deux environ deux siècles par la famille des de Lespaul... raison pour laquelle elle sera connue par la suite sous le nom de Cense Delespaul. 


Et c'est un Constantin Delespaul, propriétaire, qui assistera en 1850 au mariage d'Eliza Houzet et d'Auguste Ferret, les  cultivateurs qui exploiteront dès lors les terres. En 1868, soit 18 ans plus tard, quand le tracé de ce qui deviendra le rue du Hutin sera définitivement arrêté, (reprenant en partie seulement le tracé du sentier du Mont-à-Leux), on ne parlera plus que de la Ferme Ferret. 

Une ferme qui sera reprise par la suite par Théodore Joseph Houzet et Amélie Joseph Houzet, mariés à Roubaix en 1872, et qui sera dès lors connue sous le nom de Ferme Houzet. Leur fils, puis leur petit-fils leur succèderont et finiront même par acheter la ferme à une certaine dame Watine.

De 1890 à nos jours : de la ferme au quartier... 

A partir de 1889 cependant, le quartier se développe. Et le 24 mai précisément, les propriétaires riverains acceptent d'abandonner les terrains nécessaires à ce développement, et à participer aux frais de voirie. En 1890, la rue Delespaul sera ouverte - c'est le début de la réalisation du quartier qui fera l'objet d'un plan d'urbanisme à partir de 1894... et le début de la fin pour les champs et les pâtures de la ferme du Hutin !

Si elle a changé plusieurs fois de numéro pendant tout ce temps (les 6, 18 et 44 sont les numéros qui reviennent le plus souvent), la ferme continue cependant à être exploitée par la famille Houzet. Ainsi, en 1924, c'est le petit-fils de Théodore, Henri Théodore Houzet-Bouckaert, qui en est le propriétaire et l'exploitant. 

La ferme Houzet est grande (10 Ha de terrain) et plutôt riche. Elle se compose d'une étable pour les vaches, d'une écurie pouvant accueillir deux chevaux, d'un poulailler avec différentes volailles (des poules, des canards et des pintades essentiellement) et d'un pigeonnier. On y stocke aussi bien les betteraves que le foin ou les graines et les futures semailles pour le potager. 


      

                                             Vue aérienne de la ferme et des vergers, 1953,IGPN.

On y tuait bien évidemment le cochon pour préparer pâtés, boudins, et les saucisses... et on faisait fumer le jambon dans des tonneaux prévus à cet effet, avant de le cuire très lentement dans un bouillon de légumes.

Enfin, dans la cave aussi fraîche qu'il se doit, on trouve des conserves de pâté, du jambon, des légumes, du vin, des tonneaux de bière, du fromage, du lait, du beurre... Un beurre au goût bien reconnaissable puisque les bovins de la ferme étaient souvent nourris avec les déchets de la brasserie moderne toute proche (la drêche, c'est-à-dire les résidus de l'orge après soutirage du moût), ce qui lui donnait parfois un léger petit goût de bière ! 

Quand Henri Théodore Houzet-Bouckaert reprend l'exploitation, il n'y a encore que deux maison et un café à proximité de la ferme. Le reste n'est que pâtures et champs. Cependant, cela ne durera pas. Même si elle est grande et plutôt riche, l'exploitation de la ferme ne suffit bientôt plus, et le fermier se reconverti. Les 6 vaches seront elles aussi vendues. 


                                   

                                           Les garages derrière la ferme, 1964, IGPN.

La ferme devient une entreprise de transport, les terrains restant des garages, et le camion Chevrolet nouvellement acquis sera conduit par le fils de Henri-Théodore. 

Henri Théodore Houzet Bouckaert cessera son activité en 1956. Aucun de ses deux enfants ne reprendra son exploitation : son fils est contremaître dans le textile, tandis que sa fille est partie vivre en Afrique du Sud. Le bâtiment existe toujours, typique des vieilles censes d'autrefois avec sa cour carrée.


                                                    La ferme du Hutin, en 2013, vue Google.



Avec nos remerciements à Agnès Deffrenne Houzet, à laquelle nous devons la description de la vie à la ferme. 



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